19 novembre 2025

COPAIN / BELEM / RoW

 Belém en ébullition — Chant des peuples debout



BELÉM ,POISON D'AURORE
10 heures du matin. Déjà 31 degrés.
Une chaleur qui ne caresse pas : elle mord.
Elle laisse sur la peau une trace d’incendie,
comme un rappel que le monde brûle


La COP30 s’enlise depuis cinq jours
dans ses palabres de porcelaine,
fragiles, inutiles, tournant sur elles-mêmes
comme des fleurs fanées qui s’obstinent à exister.

Dans la marée battante, des arcs vibraient comme des prières,
des flèches scintillaient comme des avertissements,
les maracas secouaient la poussière des mensonges,
et les pancartes étaient peintes avec le rouge des vérités que personne ne veut voir.

Et puis un chant. Un chant tressé de siècles,
aussi ancien que les racines du monde,
un chant qui ne meurt pas, celui du peuple Munduruku 

Peuple du Pará, Peuple de l’Amazonie,
Peuple du Mato Grosso, Peuple du territoire Sawré Muybu,
Peuple du fleuve, Peuple des ombres vertes,
Peuple qui sait.

Elisa, vingt-sept ans,
couronne de plumes comme un lever de soleil,
visage noirci de guerre,
dit doucement :
« C’est notre cri de lutte.
Celui qu’on entonne quand l’ennemi approche. »

Et ici, l’ennemi n’a rien d’un mystère.
Il porte ses logos polis,
ses bilans calibrés,
ses sourires d’actionnaires.
Il ronge la forêt comme un ver,
il étouffe les rivières,
il dévore des territoires entiers
avec l’indifférence des machines.
Ce sont les grandes entreprises
celles qui tuent la forêt
et dont les profits brillent
comme des lames fraîches.

Pendant ce temps,
derrière les barrières bleu ONU,
on joue aux COP’ains COP’ines,
mime parfait de vertu,
gestes calculés, discours parfumés,
les mêmes promesses,
cire tiède,
coulant entre les doigts
depuis des années.

Au cœur de Belém,
la Terre parlait.
Et ce n’était pas leur langue.
C’était un grondement profond,
un souffle ancien,
un mot que seuls entendent
ceux qui ont déjà saigné.

Les peuples ont marché,
non pas pour être vus,
mais pour être crus.
« Nos voix sont ignorées »,
« La destruction continue »,
Et chaque syllabe
semblait tomber comme un fruit trop mûr,
explosant en vérité sur le sol.

La « zone bleue » se voulait sanctuaire.
Elle n’est que mirage,
une clairière truquée
où les costumes légers dessinent
des promesses qui ne tiennent pas la nuit.

Sans justice sociale,
la justice climatique n’est rien.
Sans les peuples,
pas de Terre 

Leur colère,
légitime, ancienne,
porte en elle la mémoire du bois qui tombe,
du fleuve qui pourrit,
du ciel qui rougit,
de la forêt qui brûle
dans un silence que nous avons imposé.

À Belém,
la marche n’a pas demandé l’aumône.
Elle a demandé la vérité :
ce trésor que nous cachons,
ce poison que nous buvons.

Les COP’ains COP’ines
jouent à dessiner l’avenir
sur des nappes immaculées.
Les peuples, eux,
dessinent la survie
avec leur souffle,
leur peau,
leur sang.

Ce jour-là,
la Terre a parlé en chant Munduruku :
en milliers de pas,
en visages peints,
en cris qui scintillaient
comme des éclats de roche,
en colère claire,
en vie debout.

Et nous 
nous avons à peine regardé.
Puis, vite détourné la tête,
comme si détourner la tête
pouvait laver
les taches que laisse
un  monde qui meurt.

 


“Belém, poison d’aurore”

10 h. 31 degrés. La Terre suffoque.
Et te dit : « Brûle avec nous. »

Belém déborde. Un peuple-planète se lève
pendant que la COP s’enlise.

Dans la foule : perles, arcs, flèches,
pancartes plus vraies que leurs lois.
Et un chant qui ouvre la peau :
le chant Munduruku.

« C’est notre cri de lutte.
Le chant qu’on lance quand l’ennemi arrive. »

L’ennemi n’est pas un fantôme : 
c’est une entreprise. Un logo.
Et nous sommes la forêt massacrée. Le fleuve empoisonné.
Nos enfants sacrifiés.

Derrière la zone bleue, ils jouent les COP’ains COP’ines,
à promettre du vent sous la clim’.

Ils parlent sécurité. Ils parlent protocole.
Ils parlent demain. Mais ils n’écoutent pas la Terre.
« Nos voix sont ignorées. La destruction continue. »

La COP « inclusive » n’ouvre qu’aux badges.
Pas aux blessures.

Sans justice sociale, pas de justice climatique.

Alors les peuples marchent. Ils chantent.
Ils frappent. Ils dérangent. Ils réveillent.

À Belém, ce jour-là,
la Terre parlait Munduruku.
En colère. En chaleur. En vérité.

Les COP’ains peuvent continuer leur théâtre.


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