07 novembre 2025

CLOS / CHEVAUX / Row

 

Clôtures de lumière


Bien que belles à l’œil, ces lignes bien dressées,

Ont d’abord un usage et non des moindres pensées :
Garder le cheval libre, mais contenu,
Sous le vent des prairies, dans l’espace tenu.

Car le cheval s’effraie, son instinct est la fuite,
Son cœur bat la mesure, son muscle s’y précipite.
Et s’il sent la contrainte, il cherche à s’en défaire,
Blessant son flanc parfois sur le fil ou le fer.

Alors l’homme inventa ces murs sans pierre,
De bois ou de métal, visibles, clairs et fiers,
Où le cheval distingue, d’un seul coup d’œil précis,
La limite du champ, la paix et le sursis.

Ces clôtures de lisses, peintes en blanc, en gloire,
Sont plus qu’un ornement : elles savent leur histoire.
Elles parlent à l’œil, aux muscles du destrier,
Barrières lisibles, gardiennes du métier.

Trois fonctions alors guident l’art de les construire :
Utilité, sécurité, et le plaisir de luire.
Mais la juste mesure dépend du cœur humain :
Budget, valeur, beauté, marchent dans la main.

La hauteur du rempart n’est jamais hasardée :
Un mètre vingt au moins, un cinquante souhaité.
Le cheval, noble athlète, saute avant de frapper,
Et mieux vaut le dissuader que le rattraper.

Pour les paddocks étroits, les enclos d’étalons,
La règle est subtile : le haut doit à bon ton
Se tenir à hauteur de regard équin,
Quelques doigts au-dessus du garrot souverain.

Ainsi, le Shire immense, doux géant d’Angleterre,
Demande des barrières hautes comme un hémisphère.
Mais pour séparer champs ou petites prairies,
Cent vingt centimètres font juste harmonie.

Le bas, lui, se doit de laisser trente centimètres :
L’air, la tonde, la main, le fil qui s’y pénètre.
Car l’herbe pousse et frotte, et le métal s’émousse,
Le rotofil passe, l’entretien s’y pousse.

Rails ou planches de bois, vinyle ou polymère,
Chêne, pin, PVC, l’homme a su faire lumière.
Le bois peint en noir, trempé d’asphalte ou d’eau,
Résiste à la pluie, au temps, au sabot.

Le CCA protège, le goudron polit l’âme,
Mais l’arsenic s’interdit, le savoir se réclame.
On bannit créosote et produits déments,
On peint d’eau claire et de pigments bienveillants.

Le PVC brille au soleil sans besoin de repeindre,
Mais doit, lui aussi, sous la mousse se contraindre.
Un lavage régulier lui garde son éclat,
Et le bois sous vinyle vit, plie, mais ne ment pas.

Vient le fil tendu, serpent invisible,
Polymère ou métal, lisse, souple, sensible.
Sa beauté tient au geste : tension, ligne et son,
La frontière chante sous chaque impulsion.

Les grillages en nœuds, les mailles en losanges,
Offrent sûreté, durée, aux chevaux qu’on échange.
Cinq centimètres d’espace, deux fils entrecroisés,
Et le fil haut carbone, du 2,5 mm d'acier.

Mais l’électricité vint ajouter son poème :
Courant, lumière, choc, discipline suprême.
Non pour punir, mais pour enseigner le respect,
Une ligne invisible où l’élan s’arrête net.

Le ruban vibre au vent, phénomène subtil,
Le “fasseillage” murmure, la rupture se profile.
Alors on le torsade, on lui donne un ressort,
Et la science rejoint le geste du corps.

Les lignes se répondent, positives, négatives,
Reliées à la terre, en symphonie vive.
Bentonite au sol, l’humidité conserve,
L’électricité circule, la clôture observe.

Des mille volts, mais zéro douleur,
Car le choc est bref, et la charge a du cœur.
Ainsi l’animal apprend sans blessure, sans cri,
La limite du champ, le langage de l’esprit.

Mais gare aux herbes hautes qui touchent les fils,
Elles volent le courant, court-circuitent l’idylle.
Le sol doit être clair, les prises bien ancrées,
Car la terre, en retour, ferme l’électricité.

Et lorsque l’homme teste le fil du doigt,
Il comprend à son tour la leçon qu'il doit :
Respecter la tension, le rythme et la mesure,
C’est comprendre la vie… à travers la clôture.

Ainsi l’art équestre rejoint la mécanique,
Le geste du bâtisseur devient presque lyrique.
Et dans ce fil tendu entre science et passion,
Vibre une seule chose : la précaution.


RoW 11/25

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